En de pareilles circonstances, dans de nombreux pays, un tel manque de nourriture et de médicaments aurait provoqué le chaos. Mais en Corée du Nord, des millions de soldats contrôlent le pays et sont prêts à écraser toute révolte.

Selon les Nations Unies, la Corée du Nord a besoin d’environ 860.000 tonnes de grain cette année. Or, le pays n’a presque plus de réserves de nourriture.
Le risque de famine grandit. A cause du confinement, les importations sont au plus bas, et la majorité de l’approvisionnement alimentaire provient désormais de la production des fermes collectives. Les produits alimentaires vendus de manière officielle sont épuisés et des stockages se font dans tout le pays. La plupart des produits alimentaires (sucre, maïs, blé, farine, huile) ont vu leur prix quadrupler.

La réduction drastique des importations provoque également une pénurie de médicaments. Les personnes souffrant de maladies chronique (diabètes, hypertension, tuberculose…) ne peuvent plus se soigner. La tuberculose se répand dans tout le pays. Il est extrêmement difficile d’obtenir certains médicaments, comme de la pénicilline, de l’insuline ou d’autres produits de ce genre. Un observateur nord-coréen raconte: 

«Le manque de nourriture rend la survie encore plus pénible pour beaucoup. Mais une pénurie de médicaments fait courir un grand risque à toute la population.»
 

L'aide internationale est insuffisante

La Corée du Nord possède plusieurs usines de production pharmaceutique mais ces produits sont de très mauvaise qualité. Toutes ces usines sont d’ailleurs fermées, à cause du manque de matière première provenant de pays étrangers. L’élite du pays compte sur la livraison de produits étrangers. Le pays a reçu des livraisons d’urgence de la part d’organisations internationales. Toutefois, ces livraisons restent insuffisantes et ne parviennent même pas à pallier le manque de produits nécessaires pour les maladies conventionnelles.

Cela fait des années que les hôpitaux de Corée du Nord sont incapables de fournir assez de traitements médicaux et de médicaments, dans un contexte normal. Le réfugié nord-coréen Timothy Cho se souvient: «Lorsque je vivais en Corée du Nord, je pouvais compter mes visites à l’hôpital sur les doigts de la main. Quand j’avais besoin d’une injection, mes parents m’amenaient chez un docteur privé. Ma grand-mère allait fréquemment dans les montagnes pour cueillir des plantes soulageant les maux de tête et d’estomac. Elle les faisait bouillir quand les symptômes arrivaient. Mais cela ne marchait pas toujours. Parfois, cette médecine traditionnelle pouvait aussi provoquer des réactions étranges…».

En Corée du Nord, quand les gens sont malades, ils s’auto-diagnostiquent. S’ils ont suffisamment d’argent, ils peuvent aussi aller voir un médecin privé. Lorsque le médecin leur a donné une prescription, ils se rendent sur les marchés locaux afin de trouver les médicaments. 

 

La population doit «se serrer la ceinture et faire confiance au parti»

Aujourd’hui, il semblerait que le régime lève peu à peu les restrictions. Les résidents étrangers peuvent à présent se rendre dans les magasins du gouvernement. Les écoles ont réouvert cette semaine. Mais d’après une source présente dans le pays, les écoles demandent aux parents de payer, pour financer l’achat d’équipements de désinfection (que le gouvernement ne peut subventionner).

Malgré tout, les frontières restent fermées. Difficile de prédire ce qu’il adviendra du prix de la nourriture, des médicaments ou des produits agricoles…

Pendant ce temps, les journaux nord-coréens insistent sur le fait que la population doit «se serrer la ceinture et faire confiance au parti» pour sortir de cette situation délicate. Le régime a prévu d’incriminer les sanctions internationales si de nombreux citoyens venaient à mourir de faim. Les Nord-Coréens ayant réussi à s’échapper du pays comparent cette année critique à l’année 1994, quand a commencé la période de famine appelée «Marche forcée» (1994-1997).

 

Frontières fermées depuis janvier

La Corée du Nord a d’abord fermé ses frontières à la fin du mois de janvier, afin d’empêcher le Covid-19 de se répandre dans le pays. La Corée du Nord est déjà, en temps normal, fortement isolée, mais cela s’est accentué avec la fin des échanges commerciaux avec la Chine, pourtant son plus grand pourvoyeur. La sécurité aux frontières a été renforcée, ce qui rend l’évasion vers la Chine encore plus difficile. Les personnes surprises en train de traverser la frontière sont désormais immédiatement abattues.

La situation est devenue vraiment critique en février-mars, et tous les événements nationaux (parades..) ont été annulés. Dans le même temps, les médias nord-coréens ont reconnu que des milliers de citoyens étaient en quarantaine et que beaucoup d’entre-deux étaient «sous observation médicale». Malgré tout, le régime nord-coréen continue d’affirmer qu’il n’y a aucun cas d’infection...

 

Des centaines de milliers de Nord-Coréens pourraient être positifs au Covid-19

Il est impossible de savoir exactement combien de personnes ont été infectées et combien sont décédées. Des centaines de milliers de Nord-coréens pourraient être positifs au Covid-19. Kim Jong-Un lui-même n’est plus apparu en public pendant plusieurs semaines, de peur d’être infecté (à moins qu’il ne se remettait d’une opération du cœur, comme l’affirment les rumeurs).

Depuis la mi-février, Pyongyang a ordonné la fermeture de toutes les écoles et universités. Des mesures de distanciation sociale ont également été mises en place. Même si le régime prétend que ces mesures étaient préventives, des signes montrent que le virus avait commencé à se répandre dans le pays. Un article du DailyNK (un site d’actualités géré par des réfugiés nord-coréens), affirme qu’au moins 180 soldats nord-coréens seraient morts du Covid-19. Dans le camp de concentration de Chongori, 11 prisonniers décédés avaient les symptômes du virus, dont des difficultés respiratoires. D’autres détenus présentent les mêmes symptômes et de fortes fièvres.

 

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